Premier long-métrage de la réalisatrice guadeloupéenne, Malaury Eloi Paisley, L’Homme-vertige a été couronné au Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou.
À l’affiche de l’opération Cinéma au clair de lune, du Conseil départemental de la Guadeloupe, en juillet, L’Homme-vertige, de Malaury Eloi Paisley, présenté au Festival du film de Berlin, en 2024, primé au Fifac de Guyane, est programmé sur Arte (et arte.tv).
Dans un quartier populaire de Pointe-à-Pitre voué à la démolition, des habitants à la dérive, comme pris au piège d’une ville fantôme, errent et discourent, métaphores d’une Guadeloupe vaincue par la colonisation. Chanzy, quartier populaire du centre de Pointe-à-Pitre en pleine « rénovation urbaine » où s’affairent les bulldozers et les pelleteuses, des naufragés solitaires dérivent, de jour comme de nuit.
Ti Chal, ancien militant indépendantiste, arrimé à son respirateur, cerné par la poussière des démolitions. Eddy et Priscilla, deux accros au crack et sans domicile digne de nom. Eric, longue silhouette filiforme et regard hanté, déclame dans ces lieux à l’abandon les textes littéraires qui l’habitent. Kanpèch, plein de colère après ses 29 ans « d’Europe » pour « la honte » qu’on lui inflige « en méprisant son peuple ».
Un chemin de patience
Pendant cinq ans, Malaury Eloi Paisley a regardé et écouté dans les rues de Pointe-à-Pitre ceux qu’elle considère comme des « voyants » et dont elle souligne la dignité avec empathie silencieuse.

Selon elle, ces existences reléguées dans les marges « racontent l’histoire de la Guadeloupe, l’inertie de cette île, ancienne colonie française. Que disent-elles de la lente disparition de nous-mêmes ? Cette ville qui a été celle du peuple, des révoltes écrasées dans le sang, n’est plus qu’une ville fantôme », indique la réalisatrice.
Ces errances prisonnières deviennent les métaphores et les témoins d’une humanité qui résiste tant bien que mal au gouffre. Un film dans lequel passent aussi les flammes des dernières émeutes, ultimes défaites, pour la jeune réalisatrice guadeloupéenne, d’un combat perdu contre une colonisation dont les stigmates perdurent.
Sur Arte, mardi 12 août, à 00.30.