Le Centre national de transfusion sanguine (CNTS) a collecté 10 000 pochettes de sang au cours du premier trimestre 2025, contre 21 000 sur la même période en 2023.
Une baisse drastique qui illustre un déficit inquiétant dans un pays où la violence compromet déjà l’accès aux soins de santé les plus essentiels.
L’insécurité entrave directement le fonctionnement du Programme national de sécurité transfusionnelle (PNTS). Les violences qui ont secoué le bas de la ville au cours de la semaine du 8 septembre ont provoqué une rupture d’approvisionnement dans plusieurs postes de transfusion du grand Sud, notamment celui des Cayes.
« Depuis lundi, un camion chargé d’intrants est resté bloqué à Varreux, en attente d’un embarquement vers Miragoâne. Ce convoi transporte, entre autres, des poches de collecte, des tubes de prélèvement, de l’alcool et du coton », a expliqué le Dr Ernst Noël, directeur du PNTS.
Les conséquences sont immédiates. À la fin de la semaine dernière, Le Nouvelliste a constaté que plusieurs donneurs étaient dans l’impossibilité de donner leur sang, faute de poches de collecte disponibles. Ce poste, deuxième plus important du pays, se trouve donc fortement impacté.
Le Dr Noël a indiqué ne pas être en mesure de préciser une date pour le rétablissement de l’approvisionnement dans le Sud, ni de garantir que cette situation ne se reproduirait pas.
Depuis le blocage des axes routiers reliant la capitale aux autres régions, le PNTS dépend désormais de la voie maritime pour alimenter les postes des autres régions du pays en intrants, grâce au soutien d’un mécène. Pour le Grand Sud, les camions quittent Port-au-Prince, sont transférés par bateau vers le département des Nippes, où s’effectue ensuite la répartition vers les postes de transfusion.« Nous n’avons pas d’alternative pour le moment », reconnaît le Dr Noël. « La voie aérienne est non seulement trop coûteuse, mais elle impose aussi une logistique trop lourde. Nos caisses pèsent entre 70 et 80 kilos », a-t-il ajouté.
Une collecte nationale en recul
Sur la période de janvier à juin 2025, le PNTS a collecté environ 10 000 poches de sang sur l’ensemble du territoire. Port-au-Prince, malgré l’insécurité, reste en tête avec 4 000 poches, mais en forte régression. Cette baisse affecte gravement la capacité du programme à couvrir les besoins. À peine 46 % des patients nécessitant une transfusion ont pu en bénéficier.
Dans les villes de province, les résultats sont meilleurs : la plupart des postes parviennent à couvrir 70 à 80 % de leurs demandes.
L’Hôpital universitaire de Mirebalais (HUM), qui assurait à lui seul entre 100 et 150 poches par mois, fait partie des structures les plus affectées. Fermé depuis avril 2025 à cause de l’insécurité, son absence pèse lourdement sur la chaîne nationale de collecte.
Le CNTS reste à Turgeau
Avec la progression des hommes armés au centre-ville de Port-au-Prince, le PNTS avait envisagé de délocaliser le CNTS de Turgeau vers l’Hôpital universitaire de la Paix, à Delmas 33. Mais cette option a finalement été abandonnée.
« L’espace prévu ne pouvait pas accueillir nos équipements. Heureusement, la situation sécuritaire à Turgeau s’est stabilisée, ce qui nous permet de maintenir nos activités sur place. Nous constatons d’ailleurs que les donneurs reviennent progressivement », a indiqué le Dr Noël.
Source : Le Nouvelliste
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