À l’heure où la saison cyclonique 2025 s’annonce parmi les plus actives de ces dernières décennies, la ville de Port-de-Paix semble attendre la catastrophe, impuissante face à des risques pourtant prévisibles.
Les principaux exutoires de la cité sont obstrués par des détritus, transformant les rues en pièges mortels à la moindre pluie torrentielle. Le spectacle se déroule sous les yeux complices de certains et l’impuissance d’autres.
Les maires, le délégué départemental, les directeurs départementaux et de la Protection civile sont bien là. Ils circulent en voitures officielles. Pourtant, aucune action concrète n’a été entreprise pour réduire les risques. « Ils attendent impatiemment le prochain désastre, avec son lot de pertes en vies humaines et de maisons détruites », déplore un habitant vivant dans le versant de Demelus.
Lors d’une rencontre avec les autorités départementales, le directeur général de la Protection civile, Emmanuel Pierre, avait annoncé la disponibilité d’un montant de 30 millions de gourdes pour des interventions préventives, notamment le curage des bassins versants. Trois mois plus tard, rien n’a été fait.
Le délégué départemental, Rock Excéus, accuse la Direction départementale du ministère des Finances et de l’Economie de « lourdeur administrative », tandis que cette dernière affirme attendre des dossiers « correctement montés ».
Selon la Direction générale de la Protection civile, 19 tempêtes nommées, dont 9 ouragans et 4 majeurs, sont attendues cette année, bien au-dessus de la moyenne historique. « Avec l’accélération du changement climatique, chaque saison devient plus imprévisible », a déclaré Emmanuel Pierre. Un budget de 2 milliards de gourdes a été soumis pour renforcer la réponse nationale, mais les interventions restent au point mort dans le Nord-Ouest.
En décembre 2024, des pluies diluviennes avaient déjà provoqué des inondations meurtrières à Port-de-Paix : au moins sept morts, des centaines de maisons détruites et des milliers de sinistrés. Les infrastructures, déjà fragiles, n’ont pas été renforcées depuis.
Les maisonnettes construites à flanc de montagne sont visibles à des kilomètres, exposant leurs habitants à des risques extrêmes.
Face à l’inaction des autorités, les habitants s’organisent tant bien que mal pour dégager les canaux et protéger leurs maisons, comme c’est le cas pour les travaux initiés par plusieurs organisations dans la zone de Champ d’Aviation. Mais ces efforts communautaires restent dérisoires face à l’ampleur des risques. « Nous vivons avec la peur constante que la prochaine pluie nous emporte », confie une mère de famille vivant près d’un des principaux exutoires.
Port-de-Paix illustre la fracture entre les annonces officielles et la réalité du terrain. Alors que les prévisions météorologiques annoncent une saison cyclonique exceptionnelle, l’absence de mesures préventives transforme chaque averse en menace mortelle dans la cité de Capois Lamort.
Ce spectacle se dessine alors que Port-de-Paix se prépare à célébrer sa 360e année d’existence en décembre prochain.
Source : Le Nouvelliste
