Consommation. Carburants trop chers : la Sara mise en cause

L’inspection générale des Finances (IGF) a publié un rapport resté « caché » pendant deux ans sur la structuration des prix des hydrocarbures aux Antilles françaises, Guadeloupe et Martinique. Il en ressort que la Société anonyme de raffineries aux Antilles (Sara), qui importe les produits bruts, semi finis ou finis, a une raffinerie sous-dimentionnée et qu’elle importe la plupart des produits mis sur le marché. Le sénateur Victorin Lurel a réagi, en écrivant au préfet de Région Guadeloupe Xavier Lefort.

Que dit l’Inspection générale des finances ?

« En 2022, alors que le prix des carburants et du gaz de pétrole liquéfié (GPL) atteint des niveaux record tant en métropole que dans les départements français d’Amérique (DFA – Guadeloupe, Guyane et Martinique), ces derniers y sont particulièrement sensibles.

Objet régulier de mobilisations dans le cadre des mouvements contre la vie chère – encore récemment dans les Antilles fin 2021 – ils représentent aussi un intrant pour des secteurs économiques clés (BTP, pêche, agriculture). En 2008-2009, la grève générale dans les DFA portait déjà la revendication d’une baisse des prix des carburants.

Leur situation se singularise par l’existence d’un système de prix administrés dérogeant au principe général de liberté des prix prévalant en France depuis l’ordonnance du 1er décembre 1986. Le maintien de ce système, dont le principe se retrouve dans l’ensemble des collectivités françaises d’outre-mer, est justifié par les caractéristiques de ces collectivités.

Par rapport aux autres collectivités d’outre-mer, les DFA se distinguent par l’existence d’une raffinerie, celle de la Société anonyme de la raffinerie des Antilles (SARA), qui détient un triple monopole de fait, sur l’importation de produits pétroliers bruts, finis et semi-finis, le raffinage et le stockage des produits finis, carburants ou GPL. Ce système a fait l’objet de critiques répétées au cours des vingt dernières années, conduisant plusieurs ensembles de textes réglementaires (2002, 2004, 2010, 2013-2014-2016) à lui apporter davantage de transparence, de pertinence et de réactivité sous la responsabilité de la SARA.

La mission a pu constater que si les modalités de calcul des prix sont satisfaisantes, la régulation de la SARA, le calcul de sa rémunération et la transparence du système doivent être renforcés et que l’activité de raffinage de la SARA ressort comme le principal facteur de surcoût des carburants dans les DFA.

En effet, la nécessité de couvrir les coûts de la raffinerie, ressortent comme élevés par rapport à d’autres raffineries, conduit à une augmentation du niveau des prix. La mission a évalué le surcoût lié à l’activité de raffinage, par rapport à l’importation de produits raffinés à environ 14,6 cts€/l (pour l’année 2022).

Des propositions sont formulées :

– des propositions de court terme portant notamment sur le renforcement de la régulation mais qui ne devraient pas avoir d’incidence significative sur les prix ;

– des scenarios qui pourraient avoir un impact plus structurel sur les prix mais qui nécessiteraient un arbitrage politique et une phase de négociation préalable ; notamment dans un scénario d’arrêt des activités de raffinage de la SARA. »

Victorin Lurel a réagi : « J’ai sollicité auprès du préfet l’organisation d’une réunion de travail »

« Après deux années d’attente et deux relances auprès du Gouvernement en octobre 2023 et mai 2024, l’Inspection générale des finances a enfin publié son rapport sur la « régulation des prix des carburants et du gaz dans les Départements Français d’Amérique ».
Ce rapport attendu s’avère éclairant en plusieurs points.

Il confirme en premier lieu le bien fondé et l’efficacité des décrets et arrêtés de méthode que j’avais publié contre vents et marées en 2013 et 2014 pour renforcer la transparence des prix, restreindre les marges, contrôler l’activité du secteur et lutter contre l’exorbitance des prix des carburants outre-mer. Une série de textes réglementaires qui aura permis de contenir la flambée des prix, objectiver leur montant et réduire de 10 millions d’euros chaque année les marges de la raffinerie SARA.

En second lieu, je retiens de nombreuses propositions – formulées personnellement de longue date – pour, d’une part, améliorer le contrôle de l’application des textes et, d’autre part, parfaire les dispositifs visant à favoriser l’entrée de nouveaux acteurs, à renforcer la transparence sur les comptes et donc les marges, à transférer la régulation de la SARA à la Commission de Régulation de l’Energie et à clarifier les grilles de fixation des prix.

Si je regrette que le rapport n’analyse pas les conditions contractuelles entre les compagnies pétrolières et les gérants de stations-services – et notamment les « primes de fin de gérance », n’évoque pas une révision du plafond des coûts liés aux approvisionnements (notamment les
honoraires, primes non cotées, frais de trading) ni l’impact, sur le temps long, des obligations de maîtrise de la demande énergétique sur les prix aux consommateurs, les données qu’il fournit offrent une perspective d’amélioration du marché des carburants outre-mer.

Compte tenu de l’importance de cette problématique pour le quotidien des Guadeloupéens, j’ai sollicité auprès du préfet l’organisation d’une réunion de travail pour évoquer les suites qui seront données à ces propositions et lui ai rappelé mon opposition à la décision prise en mai dernier de revaloriser par paliers la marge des détaillants dès cette année. »

Le courrier au préfet :

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