Le Centre des Arts est à l’arrêt victime de la folie des grandeurs

Qui, un jour, expliquera pourquoi le Centre des Arts et de la Culture de Pointe-à-Pitre est en chantier depuis douze ans ? Qui, un jour, dira qui a choisi de prolonger la bâtisse existante ? Qui, un jour, dira franchement que ce bâtiment d’origine assez esthétique a été défiguré par une énorme tumeur sans beauté collée au précédent ? Qui dira comment les coûts ont plus que doublé au fil des années, passant de 16 millions à 39 millions… Qui dira comment la communauté d’agglomération et la ville songent à vendre le chantier du Centre des Arts à des acteurs privés ?

Durant une quarantaine d’années, le Centre des Arts de Pointe-à-Pitre a été le temple de la culture, culture internationale au travers de concerts de pointures historiques, mais aussi culture locale, régionale, traditionnelle… Miss Guadeloupe et les autres concours de beauté, les Jeux floraux, la Plus Belle Biguine, etc. Des pièces de théâtre, des conférences édifiantes (médicales un temps), bref, le Centre des Arts et de la Culture était le temple de la vie nocturne de bon aloi. 

Du beau temps de Loulou

Un certain Louis Garel, dit Loulou, en était le grand maître, personnage attachant, avec un gros carnet d’adresses d’artistes d’ici et de partout ailleurs, un caractère égal pour redresser les uns et faire se courber les autres. L’homme qu’il fallait pour ce lieu.

Ensuite, ça été la dégringolade. Claude Kiavué, qui a succédé à Louis Garel quand celui-ci est parti à la retraite, a fait de bonnes choses avant de se rendre à l’évidence : on lui sabrait son budget chaque année un peu plus, le temple s’écroulait, les salles était fermées les unes après les autres ravagées par les ans, les soirs de spectacle, il fallait amener une pince à linge pour se boucher le nez tellement moquettes et fauteuils, rongés par l’humidité, empestaient. 

Et puis, pour se garer les soirs de spectacles, merci ! Et on a décidé de doubler la capacité des lieux sans prévoir d’autres places de parking que les bords des trottoirs avoisinants…

Kultur ! Blockhaus !

La municipalité de Pointe-à-Pitre, qui avait fait construire le Centre des Arts et de la Culture dans les années 1975, a souhaité rénover le lieu, l’agrandir, en faire un outil moderne au service de la Culture. Kultur ?

On aurait pu le croire tant le côté germain de la bâtisse est frappante : on a vu des blockhaus, ceux du Mur de l’Atlantique, plus élégants. La culture, c’est l’ouverture. Là, c’est la fermeture qui a été choisie, avec de rares fenestrons. 

Des millions d’euros pour faire vider la carcasse de toutes les saletés accumulées en 40 ans, plus la moquette et les fauteuils pourris. 

D’autres millions pour enlever l’amiante et assainir l’antre.

Et d’autres millions pour faire une extension, extension qui devait, à l’idée de ses concepteurs, devenir le principal. Avec un accueil grandiose. 

On est ainsi, en un peu plus de dix ans, passés de 16 à 39 millions d’euros de dépenses. La faute à qui ? Aux difficultés financières et à la faillite de certaines entreprises chargées de la rénovation ainsi qu’au coût sous-estimé des travaux. On a laissé faire… Un chantier à peine surveillé. 

Un élément majeur transformé en flop

« Le Centre des Arts appartient à la sphère patrimoniale qui dynamise la ville de Pointe-à-Pitre, il sert de point de liaison entre le Centre Culturel de Sonis et la Renaissance et s’inscrit dans la logique de la politique culturelle de proximité de la Communauté d’Agglomération Cap Excellence.
Intégré dans le périmètre de la géographie prioritaire, il s’agit de redonner à la ville son pôle d’attractivité artistique et culturelle.
Le Centre des Arts est un élément majeur du projet de renouvellement urbain de la Communauté d’Agglomération de Cap Excellence.
Cet établissement public culturel et urbain, une fois modernisé, concentrera l’attention de nombreux acteurs de la ville, institutionnels ou citoyens, il constituera un lieu central dans l’animation du quartier des Lauriers.

C’est une plaquette de Cap Excellence qui nous sort cet argumentaire aujourd’hui dépassé. Car Cap Excellence, voyant que la ville, endettée ne pouvait plus aller très loin sur ce chantier, a repris la main. Aujourd’hui, plus personne ne veut poursuivre le projet. Il y a d’autres priorités : l’eau, l’environnement, etc.

Quel gâchis ! Pitié pour notre patrimoine architectural : faites sauter le blockhaus avant qu’il serve de lieu de squatt aux générations futures !

André-Jean VIDAL

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