Pour renforcer certains dispositifs face à l’urgence, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) propose des mesures complémentaires au projet de loi de Lutte contre la vie chère en Outre-Mer déposé par le gouvernement, le 30 juillet.
Pour le Conseil économique, social et environnemental (CESE), la crise du pouvoir d’achat est celle d’un modèle économique dans son ensemble. Le problème est systémique et multifactoriel :
- surcoûts liés aux importations
- concentration des principaux importateurs et distributeurs
- taille des marchés locaux
- fiscalité locale assise sur les importations
- manque d’emplois locaux et faiblesse des revenus
- insuffisance des productions locales y compris pour les produits frais.
Face à ce constat, le CESE a adopté, en octobre 2023, un avis intitulé 10 préconisations pour le pouvoir d’achat en Outre-mer. Pour cet avis, la délégation aux Outre-mer du CESE a travaillé en complémentarité avec la Commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur Le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution.
Aller plus loin face à l’urgence
Le CESE salue le projet de loi déposé par le gouvernement le 30 juillet 2025 pour lutter contre la vie chère dans les Outre-mer, et propose certaines mesures complémentaires pour aller plus loin face à l’urgence, sur la base des préconisations formulées dans l’avis.
L’article 1er du projet de loi vise à abaisser le seuil de revente à perte applicable dans les Outre-mer en déduisant les coûts de transport. Le CESE met en garde sur « un risque de distorsion de concurrence de ce dispositif compte tenu du fait que certains opérateurs économiques ne pourraient pas amortir les coûts du fret sur d’autres produits, par exemple, des importateurs mono-produits.
Le CESE se prononce pour une action « plus volontariste de péréquation tarifaire du fret sur la base d’engagements des compagnies maritimes assurant la desserte à destination des Outre-mer ».Le CESE préconise également de définir juridiquement un « droit à la continuité territoriale » pour les Outre-mer afin de poser un cadre législatif adapté, à l’instar des mesures existantes, par exemple pour la Corse.
Améliorer le « bouclier qualité-prix »
L’article 2 porte sur l’amélioration du dispositif relatif aux négociations des accords annuels de modération des prix de produits de grande consommation, dits accords « bouclier qualité-prix », favorisant la modération des prix des produits dans les territoires ultramarins. Pour le CESE, le bouclier qualité-prix est « un instrument utile qui gagne à être renforcé ».
Le CESE se dit « très favorable » au renforcement du rôle des observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR). Pour le CESE, le nombre de produits concernés par le « BQP » doit être élargi au-delà du minimum et concerner largement l’ensemble des produits de première nécessité (alimentaire, hygiène, santé, forfait téléphonique…). Le CESE plaide pour que, dans chaque territoire, la négociation annuelle concernant le bouclier qualité-prix engage l’ensemble des acteurs concernés : distributeurs, grossistes, importateurs, transporteurs maritimes, producteurs locaux, OPRM, préfet, avec la participation de citoyens tirés au sort.
Des produits alimentaires de meilleure qualité
Le CESE demande un renforcement de la qualité nutritionnelle des produits alimentaires et de la part de la production locale du « BQP ».

Concernant l’article 6, le CESE a demandé « à plusieurs reprises le dépôt obligatoire et effectif des comptes annuels des entreprises des secteurs d’activités de la distribution auprès du tribunal de commerce ». Il est particulièrement utile de créer une obligation légale faite aux distributeurs de fournir aux autorités chargées de la concurrence des informations sur les prix et les marges un niveau global dans le respect du secret des affaires. Le CESE est « très favorable » au renforcement des moyens de contrôle de l’Autorité de la concurrence prévu par le projet de loi.
Le CESE demande également un contrôle approfondi des concentrations verticales qui agrègent au sein d’un même groupe, grossiste et distributeur, ou importateur et distributeur. Le CESE recommande à la suite de l’Autorité de la concurrence d’introduire dans le code de commerce une nouvelle disposition qui permettrait de sanctionner, dans les Départements et Régions d’Outre-Mer, le fait pour un acteur intégré disposant d’une exclusivité de fait de discriminer ses clients tiers par rapport à ses conditions de ventes intra-groupes.
Bon à savoir
Concernant l’article 7, pour le CESE certaines pratiques commerciales de la distribution doivent être mieux encadrées.
Le CESE rappelle que les « marges arrière » sont interdites depuis 2005 et demande aux enseignes en Outre-mer d’afficher un prix « triple net » entre un fournisseur et le distributeur qui intègre toutes les remises, rabais et ristournes, rendant ainsi la concurrence plus lisible au bénéfice des consommateurs.