Vendredi matin, dans les locaux de la préfecture, le préfet de la Martinique, Étienne Desplanques, a tenu un point presse pour présenter un bilan d’étape de la stratégie de lutte contre la pollution à la chlordécone.
Aux côtés des représentants de l’ARS, de la DAAF, de la Direction de la Mer et de la coordination nationale, il a rappelé que l’État est pleinement mobilisé pour sortir durablement du risque chlordécone.
Dotée d’un budget global de 130 millions d’euros sur la période 2021-2027, la Stratégie Chlordécone IV entend répondre à l’ampleur du scandale environnemental qui touche la Martinique et la Guadeloupe. À mi-parcours, 48 millions d’euros ont déjà été engagés, soit plus d’un tiers du budget, pour des actions concrètes : gratuité des analyses, contrôle des produits agricoles, indemnisation des victimes, et soutien aux collectivités.
« Nous avons un devoir de transparence sur le sujet de la chlordécone à l’égard de tous les acteurs », a affirmé le préfet Étienne Desplanques.
« Le droit à réparation est reconnu. Il faut désormais que chacun ose le revendiquer. »
Trois piliers pour sortir du risque chlordécone
Le préfet a structuré son intervention autour de trois grands axes : l’indemnisation des victimes, le contrôle environnemental renforcé et la recherche scientifique.
Indemnisation : des droits facilités, un dispositif renforcé
Le Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, actif depuis 2020, est pleinement opérationnel. 103 dossiers ont été acceptés à ce jour, avec l’appui de l’association Phyto-Victimes, chargée d’accompagner gratuitement les bénéficiaires. Une mission nationale d’inspection est envisagée pour élargir le périmètre d’indemnisation au-delà du seul public professionnel.
Agriculture et pêche : traçabilité, rigueur et reconnaissance
Côté pêche, 422 marins-pêcheurs ont reçu le macaron “pêche durable”, garantissant des pratiques conformes. Mais des tensions persistent dans les zones sensibles du Nord-Atlantique et de la baie de Fort-de-France, où la pêche informelle reste un sujet de vigilance. En agriculture, plus de 2 000 contrôles ont été réalisés en 2024, avec seulement deux cas de non-conformité sur 300 échantillons végétaux. Une prime de 160 à 200 euros est également versée aux éleveurs impactés.
Recherche et prévention : investir pour mieux comprendre
Le budget recherche a été doublé d’ici 2030, avec des programmes ciblés sur les cancers, la fertilité féminine (projet CARU Fertile), ou encore la dépollution des sols. Un colloque scientifique international est annoncé pour 2026. La directrice de projet, Edwige Duclay, a rappelé l’importance de combiner analyses de sols gratuites, accompagnement des agriculteurs et soutien aux pratiques agricoles alternatives.
Collectivités, citoyens, associations : une mobilisation collective
L’État entend travailler en étroite collaboration avec les territoires. Une convention cadre signée avec l’Association des maires de Martinique permet d’ancrer le programme JAFA (Jardins Familiaux) dans l’action des communes. Sept collectivités sont déjà engagées, avec des volets éducatifs, alimentaires et environnementaux.
Un appel à projets local a par ailleurs été lancé cette année pour financer les initiatives associatives, culturelles ou sportives liées à la prévention du risque chlordécone. Les premiers retours sont très positifs, témoignant d’un engagement croissant de la société civile.
« Ce n’est pas seulement l’affaire de l’État. C’est l’affaire de toute la Martinique », a conclu le préfet.
En résumé :
- ● 130 millions d’euros prévus sur 2021-2027, dont 48 M€ déjà engagéS
- ● Analyses de sang (chlordéconémie) et de sols gratuites, accompagnement personnalisé
- ● 103 dossiers indemnisés via le FIVP, accompagnés par Phyto-Victimes
- ● 422 pêcheurs labellisés, 2 zones sensibles sous surveillance
- ● 2 000 contrôles agricoles en 2024, 2 cas de non-conformité
- ● Recherche scientifique renforcée, colloque international prévu en 2026
- ● 7 communes engagées, convention active avec les maires
- ● Appel à projets en cours, site internet d’information en développement
- ● Une stratégie évolutive, co-construite avec les acteurs du territoire