L’académie des sciences (Paris) a accueilli, mercredi 8 octobre, la 19e édition de la remise des prix du programme Pour les femmes et la science. Parmi les lauréates, deux Guadeloupéennes, Ludivine Roumbo et Yolène Duchaudé, doctorantes.
Elles nourrissent l’une et l’autre une passion pour la science depuis l’enfance. D’abord cultivé dans la cellule familiale, leur intérêt pour la science a porté Ludivine Roumbo et Yolène Duchaudé vers un brillant parcours scolaire en Guadeloupe.
Viscéralement attachée à son île, Yolène Duchaudé, de Petit-Canal, ancienne élève du lycée Baimbridge (Les Abymes), a poursuivi ses études supérieures à l’Université des Antilles où elle prépare sa thèse de doctorat.
Majore de sa promotion en master de chimie des ressources naturelles, Yolène Duchaudé effectue ses travaux de recherche au Laboratoire des Maladies Vectorielles (LMV) de l’institut Pasteur (Pointe-à-Pitre). Elle accorde toute son attention à six plantes du jardin créole, dont la citronnelle, pour évaluer leur efficacité pour lutter contre les moustiques, vecteur de la dengue, du zika, du chikungunya. La jeune chercheuse qui compte bien continuer à travailler en Guadeloupe, une condition sine qua non à son bien-être, souhaite, dans un premier temps, développer un produit pharmaceutique naturel pour réduire l’impact du moustique en Guadeloupe.
Parallèlement à ses travaux chronophages, mais passionnants, Yolène Duchaudé prend le temps de transmettre son savoir, notamment sur les plantes traditionnelles, à des élèves de Maternelle. Entre ses recherches, les ateliers de sensibilisation qu’elle anime, la jeune chercheuse, résolument ancrée dans son territoire, pratique la danse traditionnelle gwo-ka.
Le Prix Jeunes Talents L’Oréal-Unesco vient consacrer ses longues années d’engagement pour la science…, et ce n’est pas fini !
Un beau doublé pour la Guadeloupe
Avec Ludivine Roumbo, également doctorante, la Guadeloupe réalise un beau doublé. Parmi les 34 chercheuses, doctorantes et post-doctorantes, lauréates du Prix Jeunes Talents L’Oréal-Unesco 2025, Ludivine Roumbo et Yolène Duchaudé sont les seules originaires des Antilles-Guyane primées pour cette édition.
Elève en Guadeloupe, jusqu’à l’obtention du bac au lycée Sonny-Rupaire de Sainte-Rose, Ludivine Roumbo s’est laissée tenter par un programme d’échange dans le Michigan (Etats-Unis) avant d’intégrer le campus Pierre et Marie Curie à Sorbonne Université (Paris). Une découverte du monde qui ne l’a pas éloignée de son objectif.
Au sein du laboratoire Cycle au Laboratoire Cycle Cellulaire et Développement de l’Institut Jacques Monod, elle analyse la division cellulaire, objet de la thèse qu’elle soutiendra fin octobre.
« J’ai grandi avec l’idée que les plantes peuvent soigner »
« Mes recherches visent à mieux comprendre comment les cellules organisent leur division dans le temps et l’espace au cours du développement embryonnaire, et tout au long de la vie pour maintenir le bon fonctionnement des organismes, explique la doctorante. Nous avons identifié une nouvelle famille de protéines impliquées dans ces processus. À plus long terme, l’objectif est de décrypter précisément le rôle de ces protéines pour mieux comprendre les mécanismes qui déclenchent la division cellulaire. Comprendre le fonctionnement des rouages qui permettent à une cellule de se diviser une seule fois et à un moment précis de cibler spécifiquement l’engrenage défectueux dans les divisions incontrôlées des cellules cancéreuses, par exemple. »
Quand on sait que les parents de Ludivine ont conçu, à Sainte-Rose, un écomusée dédié à la préservation des espèces tropicales et de la pharmacopée, on comprend aisément que le fruit n’est pas tombé loin de l’arbre !
« J’ai grandi avec l’idée que les plantes peuvent soigner, raconte Ludivine. Ma curiosité m’a toujours poussée à me demander comment des plantes pouvaient soigner ! J’ai poursuivi mes études en biologie, puis j’ai dérivé vers la biologie cellulaire. »
À l’instar de Yolène Duchaudé, Ludivine Roumbo consacre du temps à chaque passage annuel en Guadeloupe à échanger avec les plus jeunes. Au sein de son ancien lycée, à Sainte-Rose, elle est toujours la bienvenue pour témoigner de son parcours, un chemin de résilience, et inspirer les futurs bacheliers.
« Je dis toujours aux élèves qu’il ne faut pas s’arrêter au premier échec : il faut toujours réessayer ! Si on vous ferme la porte, passez par la fenêtre ! »
Cécilia Larney
Un prix pour donner des ailes aux femmes dans la science
Les femmes restent sous-représentées dans les carrières scientifiques, particulièrement aux postes à responsabilités. Selon le dernier rapport de l’Unesco, les femmes ne représentent que 29,7 % de l’effectif total des chercheurs dans le monde. Pour faire émerger une nouvelle génération de chercheuses d’excellence, chaque année, près de 250 dotations scientifiques sont attribuées à des doctorantes et post-doctorantes dans plus de 140 pays.
Conçu pour « briser le plafond de verre et inspirer les plus jeunes », le Prix Jeunes Talents France L’Oréal-Unesco Pour les Femmes et la Science est une reconnaissance importante dans le parcours des jeunes chercheuses.
Chaque lauréate reçoit une dotation (15 000 € pour les doctorantes, 20 000 € pour les post-doctorantes) pour soutenir ses travaux. Elles bénéficient également de formations en communication et en leadership, pour mieux affronter le « plafond de verre » et mieux valoriser leurs recherches scientifiques.
Depuis 2007, la Fondation L’Oréal, en partenariat avec l’Académie des sciences et la Commission nationale française pour l’Unesco, distingue chaque année de jeunes chercheuses. En 2025, 34 doctorantes et post-doctorantes, sélectionnées parmi près de 700 candidates par un jury de plus de 30 membres de l’Académie des sciences, ont été récompensées pour leurs recherches prometteuses.
