La dégradation de la situation socio-économique et l’augmentation du coût de la vie, particulièrement perceptibles en Outre-Mer, n’épargnent malheureusement pas les étudiants.
Si Annick Lafrontière, directrice générale du CROUS Antilles-Guyane, ne manque pas de projets pour améliorer le cadre de vie des étudiants en Guadeloupe, Guyane et Martinique, les urgences du quotidien pour soutenir les étudiants en difficulté, occupent une place prioritaire.
Aides alimentaires, au transport, au logement, à l’achat d’équipement… mobilisent pleinement les équipes du CROUS Antilles-Guyane. « Avec la précarité grandissante, les étudiants se tournent vers nous, explique Annick Lafrontière. Nous proposons des repas complets à 1 euro, au lieu de 13 euros, matin, midi et soir, pour tous les étudiants boursiers. Les non-boursiers doivent se rapprocher d’une assistante sociale pour bénéficier ponctuellement du repas à 1 euro. Nous attribuons aussi la somme de 400 euros en numéraire en plus de l’accès au restaurant universitaire à 1 euro, pour être sûrs que l’étudiant mange à sa faim. »


Pour répondre aux besoins des étudiants, chaque semaine, une commission se réunit pour statuer sur les aides ponctuelles à attribuer. « S’il y a une urgence, précise la directrice générale, nous répondons très rapidement au besoin de l’étudiant. »
La précarité alimentaire est la première difficulté des étudiants. Si la Guadeloupe et la Martinique disposent déjà d’une épicerie solidaire sur le site du CROUS, les étudiants de Guyane devraient pouvoir en profiter à partir de janvier.
« Les parents ont du mal à contribuer aux frais de scolarité »
Environ 25 000 étudiants sont comptabilisés par le CROUS : 5 000 en Guyane, un peu moins de 9 000 en Martinique et un peu plus de 10 000 étudiants en Guadeloupe. Plus de 16 000 dossiers de demande de bourse ont été traités. Depuis septembre, le CROUS Antilles-Guyane a versé plus de 150 474 euros d’aides ponctuelles, dont 64 528 euros d’aides alimentaires.

« La précarité s’est vraiment aggravée surtout pour l’alimentation, confirme Esther Silvestre, conseillère technique du service social, responsable du service social du CROUS Antilles-Guyane. Les parents ont de plus en plus de mal à contribuer aux frais de scolarité. C’est vraiment très touchant d’entendre des étudiants dire qu’ils ne mangent pas tous les jours, ni trois fois par jour. »
À l’alimentation, viennent se greffer d’autres difficultés financières pour le transport, le logement, l’achat d’équipement informatique. Autant d’écueils pour lesquels le CROUS Antilles-Guyane mobilise ses ressources pour apporter des réponses ponctuelles ou plus durables. La priorité absolue étant d’éviter tout décrochage, toute rupture dans la scolarité. Et ce n’est pas une mince affaire !
« Nous prenons en charge toutes les difficultés que peut rencontrer l’étudiant pour qu’il poursuive ses études dans les meilleures conditions, insiste Annick Lafrontière. Même les étudiants qui ne sont pas boursiers peuvent avoir une aide de la part du CROUS. »
Des transports gratuits pour les étudiants ?
Pour ce qui est de la santé, la convention établie entre la CGSS, l’Université des Antilles et le CROUS permet de mieux accompagner les étudiants dans leurs soins de santé. En parallèle, le CROUS organise régulièrement des actions de sensibilisation avec ses partenaires. Après Octobre rose, une journée d’information et de dépistage gratuit du VIH, est proposée, vendredi 5 décembre, sur le site de Fouillole, de 10 à 14 heures.

La question du transport – et les frais engendrés – est aussi une vraie problématique, tant en Guadeloupe, en Martinique, qu’en Guyane. « Il n’y a pas grand-chose pour les étudiants, déplore Annick Lafrontière. Les étudiants nous demandent de leur acheter des vélos, de prendre en charge leur moyen de transport entre Kourou et Cayenne, voire de leur financer le permis de conduire. Cette difficulté à se déplacer pénalise aussi les étudiants pour trouver un job qui permettrait de compléter leurs ressources. Pourquoi ne pas envisager la gratuité des moyens de transport pour les étudiants ? »
Force est de constater que, même les étudiants boursiers bénéficiant de l’échelon le plus élevé (7, soit 650 euros par mois), ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins. La bourse, initialement conçue pour compléter le budget fourni par les parents, est bien souvent, la seule ressource financière dont dispose l’étudiant.
« La bourse étudiante, un moyen de subsistance pour la famille… »
« Il y a une cassure dans les possibilités financières des parents qui se répercute sur les jeunes. Bien souvent, la bourse devient un moyen de subsistance pour toute la famille, commente Lydie Damatrin, directrice de la vie étudiante, en charge des aides financières et vie de campus. Le jeune doit faire un effort supplémentaire pour s’en sortir. »
Dans le réseau des CROUS, les Antilles-Guyane enregistrent une proportion d’échelons les plus élevés (6 et 7) qui occupent la part la plus importante. L’an dernier, en Guadeloupe, ils représentaient 41 %, en Martinique, 36 %, et en Guyane, 59 %. « Une tendance inverse à celle du national où les échelons les plus élevés sont moins nombreux, ce qui donne une idée de la précarité », constate Annick Lafrontière.
Tant pour la question du transport, que de la précarité alimentaire…, Annick Lafrontière appelle à « travailler ensemble », notamment avec les collectivités, des partenaires privés des entreprises, les coopératives agricoles… « Le CROUS s’applique à apporter des solutions, mais il faut le soutien de partenaires. Toutes les contributions sont les bienvenues », assure Annick Lafrontière. L’appel est lancé.
Cécilia Larney
Un boulodrome en Guadeloupe, un City Stade en Guyane…
Le CROUS des Antilles-Guyane compte 2 065 logements, dont 838 en Guadeloupe, 768 en Martinique, 308 en Guyane. « Je voudrais, en Guyane et en Martinique, développer des tiers-lieux, pour avoir, sur un même site, des salles de cours, une résidence, de l’animation, un City Stade, une salle de convivialité. L’idéal serait de trouver des partenaires qui souhaitent installer leurs bureaux dans ces ensembles. »

En poste depuis le 1er juin 2025, après 14 années passées au CROUS de Corse, la Cayennaise Annick Lafrontière envisage, dans les deux prochaines années, de créer un boulodrome en Guadeloupe, un City Stade en Guyane, d’installer des pianos en Martinique…, d’effectuer des travaux aux Restaurants Universitaires de Guadeloupe et de Martinique, de mettre aux normes certains hébergements, particulièrement, les tours en Guadeloupe.
























