Manuel Valls, ministre d’État, ministre des Outre-mer, a salué l’adoption par le Sénat de la proposition de loi reconnaissant la responsabilité de l’Etat dans le scandale de la chlordécone et annonce un travail interministériel pour instaurer un nouveau dispositif d’indemnisation pour les victimes non-professionnelles. Dominique Théophile, sénateur, se veut critique?
Cette proposition de loi portée par Élie Califer, député de Guadeloupe, avait été adoptée en première lecture, à l’Assemblée, le 29 février 2024. Elle doit désormais être examinée par l’Assemblée en deuxième lecture.
Le vote du Sénat à la quasi-unanimité marque, soutient le ministre, « une nouvelle avancée attendue depuis des décennies par les populations concernées. »
Dans la discussion générale, le ministre d’Etat a évoqué le « scandale de la chlordécone [comme] une tache dans l’histoire
récente de notre pays, une fêlure dans la relation entre l’Etat et les territoires exposés : la Martinique et la Guadeloupe. »
En apportant son soutien à ce texte, le gouvernement reconnait pour la première fois, la responsabilité de l’État dans les préjudices subis par les populations, en cohérence avec les engagements du président de la République, en 2018.
«J’ai œuvré pour que les lignes bougent et que nous puissions avancer car il est temps que la reconnaissance de la responsabilité de l’État figure dans la loi », a indiqué le ministre d’État qui se félicite que les travaux parlementaires successifs aient abouti « à un texte équilibré. » Il a par ailleurs rappelé que l’Etat « agit de manière résolue depuis 2021 pour réduire les risques d’exposition, accompagner les professionnels impactés, financer les analyses et renforcer l’information du public : « L’objectif de zéro risque chlordécone est notre boussole ».
« Cette loi, attendue et nécessaire, ne saurait tout réparer, mais elle ouvre un chemin », a dit le ministre.
« Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour faire vivre ce texte et garantir, dans les prochains mois, la mise en œuvre effective d’une nouvelle voie d’indemnisation.
En effet, gouvernement s’était engagé à l’élargir pour les personnes souffrant d’une maladie résultant d’une contamination en dehors de l’activité professionnelle.
Aujourd’hui, seules les victimes malades ayant été contaminées dans le cadre de leur travail peuvent être indemnisées, via le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, le FIVP », a précisé Manuel Valls.
Le Ministre des Outre-mer, conjointement avec le ministre de la Santé et de l’Accès aux soins, Yannick Neuder lancera, dans les prochaines semaines une mission inter-inspections qui sera chargée de proposer les modalités de cette nouvelle voie
d’indemnisation.
Dominique Théophile : « Il ne reste rien ! »
« Ce texte, censé faire œuvre de vérité et de justice, ressort totalement vidé de son essence.
Deux mois auparavant, la proposition de loi du sénateur Dominique Théophile portait une ambition forte : reconnaissance pleine et entière de la responsabilité de l’État, création d’un comité indépendant d’indemnisation (le CIVIC), exonération fiscale pour les victimes, contribution des entreprises phytosanitaires et reconnaissance du préjudice moral d’anxiété.
Aujourd’hui, il ne reste rien.
La responsabilité totale de l’État a été sacrifiée au profit d’une logique diluée, incohérente et offensante, laissant à l’Etat le soin de désigner d’hypothétiques co-responsables.
Le préjudice moral d’anxiété est supprimé.
Le CIVIC est supprimé.
L’exonération fiscale pour les victimes est supprimée.
La contribution des industriels est supprimée.
Avec la rigueur et la précision que le sujet exige, c’est une humiliation pour les populations antillaises, une injure publique faite aux victimes, aux morts, à celles et ceux qui souffrent dans leur chair, et aux générations futures déjà contaminées.
L’État savait. L’État a autorisé. L’État a prolongé. Revenir sur cette vérité, c’est organiser l’oubli. Ce texte, tel qu’il sort aujourd’hui des débats, est une insulte à la justice et à la mémoire.
L’histoire retiendra qu’au lieu de réparer, ils ont maquillé. Ils ont promis la justice, ils ont organisé la mascarade. »