« Pourquoi les autorités de l’État ne déploient-elles pas leur plus grand effort à protéger ce qui reste de notre territoire et ce qui devrait être inviolable, à savoir : la vie, la liberté, la culture et la mémoire ? », se demande perplexe la Conférence des Évêques haïtiens.
Visiblement, les autorités du pays n’ont pas de solution pour freiner les atrocités des groupes criminels. Leur promesse de rétablir la sécurité demeure vide de sens. Les forces de sécurité publique sont dépassées par la situation. Encore une fois, la Conférence des Évêques haïtiens (CEH) élève la voix pour dénoncer l’inaction de l’exécutif face à la détresse de la population.
« Alors que notre pays sombre chaque jour davantage dans un chaos généralisé, et que s’effondrent un à un les piliers de la vie sociale et politique, nous, évêques catholiques d’Haïti, ressentons plus que jamais l’urgence d’adresser une parole prophétique pour que « le droit jaillisse comme une source; et la justice, comme un torrent qui ne tarit jamais ! » (Amos 5, 24) », écrivent les évêques catholiques dans note publiée le 23 juillet.
« C’est avec gravité et compassion que nous élevons la voix : pour alerter sur l’ampleur du naufrage, pour dénoncer ce qui avilit la dignité humaine, et pour proposer, à la lumière de l’Évangile, les chemins de conversion, de justice et d’espérance », affirment-ils.
Selon la CEH, nous avons une société en chute libre et dans sa mission prophétique, l’Église a le devoir de rappeler à temps et à contretemps les exigences morales, éthiques et sociales qui sous-tendent toute société où prévalent la solidarité, l’entraide et la cohésion.
« Nous assistons à une déchéance de la société et a une décadence des institutions qui en sont les piliers : un État défaillant qui n’assure plus ni la sécurité, ni la justice, ni le minimum vital pour son peuple ; un territoire morcelé, abandonné à la loi des armes et à la terreur des bandes armées ; une population en fuite, déplacée, humiliée, appauvrie, blessée dans sa chair et son âme. »
En plus de la banalisation de la vie, se plaint la CEH, la transgression du sacré témoigne d’un effondrement de l’ordre moral et de l’ordre social. Nul n’est exempt des atrocités commises par les bandes armées ; aucun lieu ni symbole n’est épargné : des lieux de culte sont profanés, des sanctuaires sont violés et saccagés, le patrimoine historique et culturel du pays est vandalisé, incendié sans aucun égard de ce qu’il représente un signe de mémoire collective, de foi partagée et d’identité nationale.
« Ces agressions ne détruisent pas seulement des pierres ou des objets ; elles frappent le cœur vivant de notre peuple, sa conscience morale, sa capacité à espérer », estiment les évêques haïtiens.
Les responsables de l’Église catholique en Haïti dénoncent « ces actes de barbarie ; ils sont le signe d’un peuple qui perd le sens de Dieu, et, avec lui, le sens de l’homme. »
« Nous nous demandons une nouvelle fois ce que cache ce projet de déshumanisation qui met à genoux un peuple déjà meurtri. Et surtout, pourquoi les Autorités de l’État ne déploient-elles pas leur plus grand effort à protéger ce qui reste de notre territoire et ce qui devrait être inviolable, à savoir : la vie, la liberté, la culture et la mémoire ? », se demande la CEH.
Source : Le Nouvelliste