Musique. Bélo : « Je reste très connecté à Haïti »

Bélo figure parmi les nombreux invités de La Créole Jazz Festival, en Guadeloupe. Artiste engagé, Prix Découvertes RFI en 2006, profondément ancré à sa terre, Haïti, Bélo est un véritable ambassadeur culturel à travers le monde. Malgré son exil forcé en Belgique, Bélo porte – et chante – l’espoir d’un changement en Haïti. Au nom de la jeunesse du pays.

Pour vos prestations à La Créole Jazz Festival, quelle formule avez-vous choisie ?

Bélo, auteur, compositeur, interprète : Il y aura un mélange de solo et de concerts avec des musiciens. Je serai notamment accompagné par Stéphane Castry, à la basse, qui m’a accueilli l’année dernière en Guadeloupe avec l’équipe de Tanmpo Jazz Créole. Je travaille avec lui depuis très longtemps. Ce n’est pas anodin que nous nous retrouvions sur scène.

Votre prochain album est prêt. Quand la sortie est-elle prévue ?

Pour l’instant, rien n’est décidé.

Pourquoi ?

En tant qu’artiste attaché à l’aspect social avant l’intérêt commercial, j’imagine mal comment je pourrais faire la promotion d’un album en sachant ce qui se passe en Haïti. Je suis aussi conscient que ma musique a un rôle à jouer face à cette situation. Je dois continuer à produire, à jouer, à diffuser des messages… Il y a des moments opportuns pour la promotion d’un album et d’autres pas : et en ce moment, c’est difficile de l’envisager.

Cet album marque un changement dans votre parcours ?

Oui. Le titre sorti l’année dernière pour annoncer l’album marque un changement dans ma création : je travaille avec un jeune Dj-producteur. Comme souvent, pour chaque album, je recherche une nouvelle identité sonore. C’est toujours du Bélo, mais avec une autre sonorité !

Vivre en Belgique change votre conception de la musique ?

Finalement, non. Depuis 2006, je collabore avec des musiciens et des producteurs qui ne sont pas nécessairement dans mon environnement géographique proche. J’ai très tôt pris l’habitude d’aller chercher le son qu’il me faut là où il est, même à Cuba ! J’ai ainsi eu l’occasion de collaborer avec des Africains, des Américains…

Vos prestations à La Créole Jazz Festival offriront un aperçu de ce nouvel album ?

Je vais surtout me concentrer sur les titres que le public connaît, d’autant que mon dernier album, Motivasyon, sorti, en 2019, n’a pas pu bénéficier d’une tournée, notamment en Guadeloupe, à cause de la crise sanitaire.

Malgré votre départ de Haïti, en 2020, vous restez très connecté au pays…

Oui ! C’est difficile pour moi d’envisager une vie normale sans un Haïti normal ! Je reste très connecté au pays : je m’informe sur ce qui se passe, je veux faire partie du changement ! Je ne fais pas partie de ceux qui attendent que les choses changent pour en profiter : j’essaye, à mon niveau, de participer au changement de Haïti.

Comment ?

Il n’y a pas d’engagement politique de ma part, mais au niveau social, j’agis ! Il y a, en Haïti, toute une jeunesse qui a besoin d’espoir, qui a besoin de savoir que ce qui se passe en ce moment n’est qu’un moment difficile de notre vie qui ne définit pas Haïti.

Par mes interventions, à travers ma musique, des conférences, même à distance, je rappelle aussi à cette jeunesse qu’elle n’est pas seule : ce n’est pas parce que les gens de la diaspora sont loin géographiquement, qu’ils ne sont pas sensibles à la situation en Haïti. La diaspora fait partie du grenier du pays : elle constitue une réserve spéciale !

J’étais en Haïti en octobre 2024 pour donner un concert à l’occasion de la commémoration du deuxième anniversaire de la mort de Mikaben, Michael Benjamin, l’artiste haïtien décédé sur scène à Paris.

J’ai pu réellement me rendre compte que la situation est très compliquée sur place.

D’où pourrait venir le changement, selon vous ?

De la jeunesse et de la diaspora. Cette situation dure depuis si longtemps que les gens sur place sont fatigués. Il faut du sang neuf, des gens avec d’autres idées, des gens qui pensent « en dehors de la boîte », comme disent les Américains. Je pense que l’espoir est là quand je vois la connexion entre des enfants de la diaspora, qui ne sont jamais allés à Haïti, avec le pays, je me dis qu’à un moment, il se passera quelque chose qui marquera le changement que nous attendons.

De ce que vous avez pu observer, le climat sécuritaire s’est amélioré ?

Il y a des jours plus sombres que d’autres. De l’extérieur, on a un feedback assez différent de la réalité. J’ai été choqué de voir à ce qui est décrit dans les médias et le quotidien sur place. Il y a un climat d’instabilité et d’insécurité, mais il y a encore des gens qui vivent, qui ont de la bonne volonté, qui ont la force de se battre et on ne peut pas l’ignorer.

Depuis six ans, en Haïti, on passe de nouvelle normalité en nouvelle normalité : le peuple s’adapte constamment parce qu’il faut continuer à vivre et à avancer malgré tout. Je salue vraiment le courage de mon peuple !

Entretien : Cécilia Larney

BélO à La Créole Jazz Festival (Le Gosier), vendredi 25 et samedi 26 juillet, à 20 heures. Réservations : www.billetweb.com

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