Politique. Ary Chalus : « Nous demandons la domiciliation d’un certain nombre de pouvoirs en Guadeloupe »

Avec Serge Letchimy, président de la CTM : « Nous avons exigé d’être reçus, soit par le ministre des Outre-mer, soit par la Première ministre. Nous irons au dîner ensuite. »

Après la réunion de vendredi dernier, qui avait réuni, outre les deux présidents des collectivités majeures, les parlementaires et le président de l’association des maires, une seconde réunion s’est tenue ce vendredi 2 août, élargie. II s’agit de préparer le rendez-vous du 7 septembre avec le président de la République, Emmanuel Macron.
Le président de Région, Ary Chalus, a fait le point avec Karib’info.
L’idée d’un changement de statut ne semble pas à l’ordre du jour. Du moins pour le président Chalus
qui ne fera rien « sans l’aval de la population guadeloupéenne

Pourquoi cette seconde réunion ?

C’est la suite de la réunion de la semaine passée. Rappelez-vous qu’en Martinique, nous avons lancé l’Appel de Fort-de-France, signé par les présidents des sept collectivités d’Outre-mer. A la suite de cet appel au président de la République, nous attendions une invitation pour nous entretenir sur les points que nous avions soulevé dans l’Appel. Le directeur de cabinet du président de la République nous avait, rapidement, confirmé que nous serions reçus début septembre. Or, nous avons, à notre grand étonnement, été invités à dîner. Serge Letchimy, qui a reçu la même invitation, a fait part de son mécontentement, ici, en Guadeloupe, quand nous nous sommes rencontrés. Immédiatement, nous nous sommes concertés avec les autres présidents de collectivités et nous avons exigé d’être reçus, soit par le ministre des Outre-mer, soit par la Première ministre. Nous avons eu gain de cause. Avant le dîner du président de la République, Gérard Darmanin, ministre des Outre-mer et son ministre délégué, Jean-François Carenco, vont recevoir les sept présidents des collectivités.

Sur quoi porteront les discussions ?

Sur ce que nous avons listé dans l’Appel de Fort-de-France. Il y a des politiques publiques à mettre en place et des évolutions à envisager, territoire par territoire, en concertation avec les populations. Par la suite, nous aurons une rencontre avec le Président de la République et ensuite nous irons au dîner.

« Nous irons à Paris parler
de l’avenir de la Guadeloupe »

« Nous avons parlé et c’est à l’unanimité que nous nous sommes entendus. Nous irons à Paris parler de l’avenir de la Guadeloupe mais surtout obtenir de l’Etat plus de responsabilités. »

Vous souhaitiez une large concertation avant ces rendez-vous parisiens du 7 septembre. Donc, dans la deuxième réunion, qui s’est tenue ce vendredi, vous avez élargi le panel d’invités ?

J’ai voulu que les présidents des communautés d’agglomérations soient présents, ainsi que les présidents et directeurs d’institutions et aussi les représentants du monde économique. Ils sont venus, nous avons parlé et c’est à l’unanimité que nous nous sommes entendus. Nous irons à Paris parler de l’avenir de la Guadeloupe mais surtout obtenir de l’Etat plus de responsabilités pour ce qui est de l’eau, de l’environnement, des problèmes de sargasses, des problèmes de transport, de santé et voir ensemble comment mettre en place des politiques publiques qui vont satisfaire les populations.

Aujourd’hui, il y a des pertes de financements dans tous les domaines pour les collectivités, Région et département, les EPCI, et il faut que l’Etat travaille avec nous pour la mise en place de ces politiques publiques. Prenons quelques exemples : celui des enseignants qui ont réussi au concours, qui sont titularisés et qui doivent partir dans l’Hexagone alors qu’ils ont des conjoints, des maisons, leur vie ici. Et on fait appel à des contractuels pour occuper les postes en Guadeloupe. Ce n’est pas normal, il faudrait gérer cela ici. C’est pareil pour les fonctionnaires qui sont originaires de la Guadeloupe : il faudrait qu’ils aient la préférence quand il y a des postes qui se libèrent en Guadeloupe. Il y a beaucoup de choses à voir avec l’Etat pour qu’il considère les élus que nous sommes quand nous disons qu’il faut changer les choses.

C’est un des volets des discussions que mettre en place des politiques publiques, mais il y a un autre volet, celui d’un autre statut, non ?

L’Etat a ouvert une réforme institutionnelle pour la Nouvelle-Calédonie et pour la Corse, nous demandons aussi à entrer dans ce processus. Nous aurons le congrès des élus, nous aurons le temps, en deux, trois, quatre ans, de parler avec la population pour savoir ce qu’elle veut. Cela ne nous engage à rien d’entrer dans ce processus, mais au moins nous ne perdrons pas vingt ans encore s’il y a une réforme institutionnelle.

« J’ai toujours dit que je ne ferai
rien sans l’aval de la population »

Deux, trois quatre ans ? Vous allez mettre autant de temps à vous décider ?

On ne peut pas dire, cela dépendra de la volonté de la population. J’ai toujours dit que je ne ferai rien sans l’aval, l’accord de la population guadeloupéenne.

Peut-on envisager que vous travailliez, avec les autres élus vers une réforme statutaire conduisant à l’autonomie de la Guadeloupe ?

C’est fonction des séances de travail que nous aurons, ce n’est pas une question d’autonomie ou de pas d’autonomie au sens statutaire. Ce que nous voulons c’est plus d’autonomie en termes de décisions sur certains secteurs qui sont de la compétence de l’Etat et que nous souhaiterions gérer localement.

Donc, on irait plutôt dans ces discussions avec l’Etat vers plus de compétences locales sans aller jusqu’au statut d’autonomie ?

Tout à fait, ce que nous voulons c’est gérer, prendre des décisions nous-mêmes sur les domaines dont nous avons parlé plus tôt. Il n’est pas normal qu’aujourd’hui nous soyons obligés de passer par la préfecture ou l’Agence régionale de santé ou la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement sur certains dossiers que nous pouvons gérer nous-mêmes. C’est ce que nous demandons : la domiciliation d’un certain nombre de pouvoirs en Guadeloupe.

Plus de compétences, mais aurez-vous plus de moyens financiers ?

Ce sera inclus dans le processus de discussion. Les parlementaires auront la charge de défendre ceci par la suite.

« Je pense que le nouveau gouvernement
a la volonté de faire avancer les choses »

Pensez-vous que vous pourrez faire infléchir l’Etat, généralement très soucieux de ses compétences ?

Je ne vais pas utiliser le mot infléchir. Je pense que le nouveau gouvernement, après avoir rencontré plusieurs ministres, a la volonté de faire avancer les choses. La plupart de ces ministres ont géré des entreprises, ils savent ce que c’est que la vie. Ils connaissent le terrain. Pendant un moment, nous avons eu une République des énarques qui ne connaissaient pas les difficultés du terrain. Avec ces nouveaux ministres, c’est à nous de peser de toutes nos forces pour faire avancer les dossiers de la Guadeloupe.

Etes-vous en phase avec Serge Letchimy et Gabriel Serville qui semblent, pour leur part, plus catégoriques, allant jusqu’à mettre en avant, aussi, une évolution statutaire ?

En phase sur certains dossiers. Chaque région a ses spécificités… Chaque président défendra sa vision pour son territoire. Moi, je connais la Guadeloupe : mettons en place des politiques publiques pour satisfaire la population, l’eau, le transport, les déchets, la santé, redonnons confiance à la population. Ensuite, nous pourrons aller plus loin avec l’accord de cette population.

L’assemblée unique, pour commencer ?

On ne sait pas. On verra.

Propos recueillis par André-Jean VIDAL

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