Pr Charles-Nicolas : « La Guadeloupe manifeste un dynamisme dont les jeunes doivent s’approprier »

Le MACTe (Pointe-à-Pitre) accueille le premier atelier de l’Unesco en Guadeloupe sur le thème Dépasser le passé, libérer l’avenir, ce samedi 7 juin. Parrainée par le champion de judo guadeloupéen, Teddy Riner, la journée s’achèvera par une conférence publique du Pr Aimé Charles-Nicolas sur les conséquences psychologiques actuelles de l’esclavage transatlantique. Entretien.

Avant votre conférence publique, vous participez à l’atelier Dépasser le passé, libérer l’avenir, destiné aux 18/30 ans. Quel en est l’objectif ?

Pr Aimé Charles-Nicolas : Il y en a au moins deux. Avec les conséquences de l’esclavage et de la colonisation qui persistent, il y a ce plafond de verre qui a paralysé des talents. Il faut que les jeunes reprennent confiance en eux pour terminer ce qu’ils ont commencé avec davantage d’opiniâtreté, de persévérance.

D’autre part, une figure inspirante, une image d’identification comme celle de Teddy Riner, avec 11 titres mondiaux, mais aussi quelques échecs, a beaucoup à nous apprendre sur sa manière de surmonter les difficultés. Ces deux raisons donnent une opportunité inestimable aux jeunes Guadeloupéens. Je suis très content de constater que la Guadeloupe est déjà dans un sursaut : il y a une volonté d’aller plus loin. Il faut que les jeunes s’approprient ce dynamisme ! Le dynamisme de la Guadeloupe est un gage de réussite pour les jeunes.

Justement, sur le chemin de la réussite, l’échec fait partie de l’équation. En quoi peut-il être plus impactant des jeunes Guadeloupéens, voire Antillais ?

Parce qu’ils pensent que c’est normal : trop souvent, l’infériorisation s’est installée dans les esprits. D’ailleurs, dans tous les pays du monde, les Noirs occupent le bas de l’échelle, ce qui signifie aussi que l’esclavage a créé la conviction d’être inférieur. On observe des situations très variées. Certains sont convaincus que : « Ce n’est pas pour eux ». D’autres essayent, sont un peu déçus et s’enfoncent. D’autres encore, forts d’une certaine résilience surmontent les obstacles.

Dans l’infériorisation qui a été inculquée aux esclaves, il y a quelque chose qui est de l’ordre de l’essentialisme. Ce n’est ni une question de loi, ni de code, mais d’essence : « Par définition, parce que vous êtes Noir, vous êtes inférieur ». C’est cela, l’essentialisme. Il me semble indispensable aujourd’hui d’en sortir, de se libérer. Il y a un sursaut à lancer !

Les générations précédentes ont fait leur chemin…

Elles ont fait un chemin dans un mouvement d’identification au Blanc. C’était possible et ça a marché !

Jusqu’à un certain point ?

Oui, jusqu’à un certain point, parce qu’ils ne sont pas Blancs. Et, il y a des codes psychologiques à connaître. Avec son parcours, Teddy Riner, parrain de la Grande cause Santé mentale, pourra apporter son témoignage : il y a une préparation mentale pour se désinhiber. L’humiliation de la situation d’esclave a persisté avec parfois un désir de revanche. Mais, il faudrait qu’il soit bien orienté, qu’il soit constructif.

Le premier atelier porté par l’Unesco et votre association, First Caraïbes se déroule jusqu’à 17 heures. Et après ?

Parmi les participants, il y aura probablement des vocations d’animateur ou d’animatrice de groupes que nous formerons pour multiplier les possibilités de discussions, pour entretenir ce qui aura été lancé aujourd’hui et sortir de ce marasme.

Entretien : Cécilia Larney

Pointe-à-Pitre, Darboussier, MACTe. Samedi 7 juin, à 18 heures. Conférence publique sur les conséquences psychologiques actuelles de l’esclavage transatlantique. Pour s’inscrire, cliquer sur le lien.

Dépasser le passé, libérer l’avenir… avec Teddy Riner

Légende du judo, le Guadeloupéen Teddy Riner parraine le premier atelier en Guadeloupe organisé par l’Unesco à destination des 18/30 ans, sur Dépasser le passé, libérer l’avenir.

« La façon dont nous avons été éduqués, dont nous avons reçu le mot « esclavage » peut choquer, et peut encore faire mal aujourd’hui, indique Teddy Riner. Il ne faut surtout pas oublier, mais s’en servir pour avancer en ouvrant les chakras pour changer notre horizon, avancer main dans main. Cela passe par des petites étapes comme l’atelier organisé par l’Unesco aujourd’hui. »

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