Guadeloupe. Faute de cannes en suffisance, Gardel ferme et les salariés sont au chômage

Depuis samedi, 80% des salariés de l’usine sucrière de Gardel, au Moule, ont été placés en chômage technique. Lundi, ils seront 90%. Ne resteront que quelques cadres. La liquidation partielle est lancée.

Que s’est-il passé ? Depuis le début de la campagne sucrière, les approvisionnements ne sont pas ceux espérés en temps courant. Le collectif composé des Jeunes Agriculteurs de Guadeloupe, du Kolèktif des agriculteurs, de certaines SICAs, de l’UDCAG ne veut pas que la campagne démarre sans que les autorités et l’usinier n’aient pas relevé le prix de la tonne de canne à 120 euros (ils demandaient au début de leur mouvement 160 euros).

Pourquoi ces 120 euros ? Parce que les prix des intrants — produits phytosanitaires, engrais — ont augmenté en un an, que les prix des prestations des opérateurs de coupe et des transporteurs de cannes ont augmenté en même temps que le prix des pièces détachées pour les réparer.

Or, si le prix de la tonne de canne est à 109 euros, c’est qu’il a été fixé par un accord de 2023. Subventionné à 80%, ce prix de la tonne de canne constitue, selon les autorités, dont l’Etat, le maximum qu’il est possible de faire. Au-delà, c’est financer en vain une filière qui ne rapporterait plus rien.

Mais, le collectif, qui se targue de représenter 10 000 personnes qui vivent de la filière (avec leurs familles), n’en démord pas. C’est 120 euros la tonne de canne, sans s’occuper du taux de sucre. Ce qui revient à dire que l’usinier achète la canne… sans être sûr qu’il en tirera du sucre en suffisance pour que l’usine puisse être sinon rentable du moins équilibrer ses comptes.

Ces 120 euros, selon le collectif, reportés pendant trois ans, permettraient aux producteurs de replanter, de mieux amender leurs surfaces, de repartir sur un meilleur pied.

La situation, sur le front des négociations, est bloquée… même si le préfet, les présidents de la Région et du Département, l’Iguacanne, d’autres partenaires de la filière ont fait droit à certaines revendications du collectif, comme de faire un audit du fonctionnement du Centre Technique de la Canne et du Sucre (CTCS) qui analyse les prélèvement de cannes pour déterminer le taux de sucre, comme de mieux rémunérer les autres produits de la canne que sont la bagasse, la mélasse et l’écume.

A la Boucan, pour bloquer les éventuels transporteurs de cannes qui vont à Béron, là où il y a le laboratoire du CTCS et la balance pour peser la canne, le rond-point est bloqué par des tracteurs. Les producteurs de cannes du Nord Basse-Terre appartenant au collectif ne laissent rien passer… sauf les voitures de particuliers.

En Grande-Terre, les esprits s’étant échauffés, des inconnus ont tiré sur des Titans (camions transporteurs de cannes) qui passaient…

Les premiers jours de l’ouverture de l’usine, la canne arrivait cahin-caha. Mais, loin du déversement constant des autres années, les 1 900 producteurs de cannes qui livraient à Gardel n’étant pas au rendez-vous cette année (en 2020, ils étaient encore près de 3 000). Le collectif va de champ en champ pour dissuader les tièdes de porter leurs cannes à Gardel.

Environ 50 000 tonnes de cannes ont été broyées soit moins de la moitié que ce qui aurait du être broyé, la production de sucre étant… médiocre, avec des cannes dont la richesse en sucre est en-dessous de ce que l’on pourrait en attendre.

Les perspectives d’un apport de cannes conséquent étant hasardeux, l’usinier a décidé de fermer. Dès lundi, les dernières cannes amenées étant broyées, les chaudières vont être éteintes. Les salariés seront au chômage technique, apparemment payés intégralement jusqu’à fin mai et la réunion d’un nouveau CSE.

Pendant ce temps, les opérateurs de coupe, les transporteurs, se lamentent : ils sont eux aussi sans travail.

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