André Atallah a des ambitions pour Basse-Terre

Pas question d’augmenter les impôts pour le nouveau maire de Basse-Terre. Photo DR

Vous avez souvent été présenté par vos adversaires comme un homme froid, distant. On apprend que vous jouez du ka, et aux dernières municipales vous capitalisez la sympathie des Basse-Terriens. Maire de Basse-Terre, c’était un rêve ?

En 2014, j’étais déjà candidat, et j’avais proposé une offre politique qui annonçait mon ambition pour Basse-Terre. Mon élection en 2020 n’est pas un rêve qui se réalise, mais l’aboutissement d’un travail continu et sans relâche et d’une bonne présence sur le terrain. J’avoue, cependant avoir ressenti une grande émotion lorsque l’écharpe de maire m’a été remise (par l’épouse de l’ancien maire feu Jérôme Cléry) ce 4 juillet 2020 ; faisant de moi le maire de Basse-Terre. Moi, fils de petit commerçant né juste à côté, à la Rue de la République, me retrouver maire du chef-lieu, ça a été un moment poignant. 

Elu maire, avec une équipe composée de personnalités fortes, vous découvrez la mairie et ses secrets. Parmi ceux-ci une dette importante. Dites-nous en plus.

La dégradation des finances de Basse-Terre est hélas une vieille histoire et déjà, en 2007, la Chambre Régionale de Comptes concluait ainsi son rapport : « En conclusion la situation financière excessivement dégradée de la collectivité nécessite la recherche de sources de financement pérennes…

La chambre note au surplus de nombreux manquements au respect des règles comptables(…)  qui faussent l’image fidèle des comptes et de la situation patrimoniale. Ils doivent être corrigés. »

La situation n’a cessé de s’aggraver ; le déficit cumulé de fonctionnement de la ville en 2019   est de plus de 4 millions d’euros et le budget primitif 2020 a été voté avec un déséquilibre de fonctionnement de plus de 6 millions d’euros ! Autrement fit, la ville non seulement ne dégage aucune ressource pour travailler, non seulement n’est pas en équilibre, mais a perdu 4 millions en 2019 !

Et nous devons aussi nous assurer que les relations financières avec la CAGSC ne nous réservent pas de mauvaises surprises. 

« Il faudra envisager une meilleure gestion du patrimoine. »

Cette dette, ce sont aussi des impayés, des entreprises qui exigent d’être réglées. Comment allez-vous faire ? Négocier ?

La dette de la CAGSC envers la ville de Basse-Terre atteint 4 Millions d’€, nous sommes en négociation avec le président de la CAGSC afin de travailler ce dossier. 

Un regret que devant des dérives qui ont continué de plus belle tout au long de ces années, devant la mauvaise volonté de la municipalité, malgré les alertes répétées, l’Etat n’ait pas mis bon ordre à cette dérive infernale ! 

La situation de trésorerie est également désastreuse avec près de 9,5 millions d’euros de dettes . Mais qu’ont fait donc ces élus pour avoir plongé une ville dans un tel gouffre !

« Il faut optimiser les capacités, dont celles du personnel. »

Qu’allez-vous faire ?

Oui, il faut négocier et nous avons commencé à le faire ; il faut optimiser les capacités dont celles du personnel, (certains départs à la retraite ne seront pas remplacés), nous sommes en cours de recrutement d’un DRH (poste non occupé depuis 4 ans !!).  Il faut internaliser des gestions, dont celle du service public du stationnement, il faut assurer la rentrée des moindres recettes, il faudra envisager une meilleure gestion du patrimoine immobilier, il faudra être vertueux et se positionner sur une trajectoire de redressement qui prendra plusieurs années.

Comment appliquer votre programme avec cette dette au-dessus de votre tête ?

Nous savions ce que nous allions trouver, aussi nous avons clairement indiqué dans notre programme que nous nous donnions 6 ans pour redresser Basse-Terre financièrement ; il ne faut pas mentir ! Relisez notre programme nous avons écrit : « 3 ans pour assainir et redonner du sens à l’action publique Et 3 ans pour fonder les bases de l’avenir »

« Il ne s’agit pas d’augmenter les impôts. »

« Il ne s’agit donc pas d’augmenter des impôts déjà hors des limites acceptables. En effet, les recettes fiscales sont de 1 413 €/habitant pour Basse-Terre contre 859 €/habitant pour les autres communes de Guadeloupe de même taille. Il faudra gérer sainement de donner des assurances à nos partenaires, dont les préteurs qui pourront nous accompagner sous quelque forme que ce soit dès lors qu’ils auront cette confiance. 

Nous travaillons les dossiers d’investissement afin que nos participations propres soient les plus réduites possibles, et nous veillons à associer pleinement les opérateurs privés dans le changement de la ville. 

« On commencera par la reconquête de la culture, de l’art, de la beauté de notre patrimoine. »

Le développement économique de Basse-Terre c’est le commerce, c’est le tourisme. Comment attirer ou conserver le tissu économique ? Comment développer le tourisme ?

Chaque partie d’un territoire doit mettre en avant ses atouts propres ! Basse-Terre ne sera pas et ne cherche pas à être Providence, ou La Jaille, ou je ne sais quoi d’autre. Basse-Terre est la première ville d’art et d’histoire de Guadeloupe et à ce titre une des plus jolies villes de ce style dans la Caraïbe.  Son développement passera nécessairement par la mise en valeur ces atouts patrimonial, culturel, historique qui ont été totalement négligés pendant 25 ans ! On commencera donc par la reconquête de la culture, de l’art, de la beauté de notre patrimoine, de la mise en valeur des sites de haute valeur comme le Fort Delgrès, le jardin botanique, le Champ d’Arbaud, la Place des Carmes, les immeubles de style… On se mobilisera pour que Basse-Terre conserve son statut de chef-lieu, ville centre de la vie politique Et je n’oublie certainement pas que Basse-Terre a un port qui existe quoiqu’on en dise, qui sera une porte d’accès à un très riche patrimoine environnemental ou la biodiversité est un atout majeur. La liaison de ce port avec le centre-ville et les commerces de tout le front de mer du Carmel au bas -du Bourg fera l’objet de toute notre attention.

Basse-Terre ne sera pas liquidée comme une entreprise en faillite, car cette ville a un immense capital, riche de ses hommes, de ses associations, de son passé, de son présent et de son avenir.

Le fait de faire partie des villes retenues dans le programme ACV : Action Cœur de Ville, est une opportunité que nous saurons saisir. Ce programme avec un financement de 5 Milliards d’€ inclut 222 villes centre de taille moyenne (dont Basse-Terre). Un gros travail est actuellement en cours de finalisation par nos équipes afin de remettre la copie mi-décembre, date limite de soumissions des projets au comité d’engagement ACV. 

« Il existe une volonté d’action des Basse-Terriens. »

Êtes-vous néanmoins optimiste ?

Je suis optimiste car en face des difficultés réelles, il existe une volonté d’action des Basse-Terriens qui se mobilisent autour d’une équipe valeureuse, engagée ou tout le monde participe à l’effort commun avec ses convictions et ses compétences.

Nous le redisons, Basse-Terre a un énorme potentiel, des gros atouts à nous de transformer l’essai et de faire de notre chef-lieu ce que nous avions prévu dans notre programme : une ville attractive, solidaire, une ville capitale pour le Sud-Basse-Terre. 

Malheureusement, la Covid peut tempérer cet optimiste …

Nous sommes en train de revoir le curseur et le calendrier de notre projet pour Basse-Terre. En effet, la pandémie de la Covid modifie notablement nos priorités. Les conséquences socio-économiques seront redoutables. Toute l’année 2021 sera impactée et il faudra prioriser la solidarité et le soutien au monde économique qui est en grande difficulté. Il y a un risque d’explosion sociale certain. On souffre, on meurt du Covid avec les conséquences sanitaires ; mais on va souffrir longtemps à cause du Covid.

Propos recueillis par André-Jean VIDAL

L’écharpe remise par l’épouse de l’ancien maire de Basse-Tere, feu Jérôme Cléry. Une symbolique forte. Photo DR

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