La Grande Interview. « Nous souhaitons que l’État soit à nos côtés »

Franck Desalme, président des MPI de Guadeloupe, explique pourquoi son association est nécessaire. La visite de Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, est l’occasion de lancer quelques messages.

Vous fêtez les 50 ans de l’association MPI de Guadeloupe. Par qui et pourquoi a-t-elle été créée ?

L’association a été créée très précisément le 19 avril 1974 par une trentaine d’industriels guadeloupéens qui apparaissaient à l’époque comme des pionniers, puisqu’ils étaient les premiers à relever le défi de la diversification par l’implantation d’unités de production. Son premier président est Jean Gothland. À ses côtés, on retrouvait les noms de Jean-Claude Halley, François Germain, Raphaël Laaland, Félix Clairville ou encore Roger Lignières. L’idée était de promouvoir le développement des industries de Guadeloupe et assurer la défense de leurs intérêts. Cette idée a fait son chemin puisque la Guadeloupe compte aujourd’hui en 2024, pas moins de 3 500 établissements industriels qui emploient près de 9 000 salariés.

Qu’est-ce qui la différencie de l’UDE-MEDEF ou de la FTPE ?

Les MPI forment une organisation sectorielle, strictement concentrée sur les activités industrielles, sur la valorisation des investissements productifs qu’elles représentent, sur les emplois qui en découlent, et enfin sur la promotion des produits locaux qui font notre fierté.

Ne vaut-il pas mieux aller groupés pour présenter les revendications des entreprises guadeloupéennes ?

Il est évident que cela s’impose dans certains cas et sur certains sujets. C’est d’ailleurs une condition sine qua non d’efficacité. Les diverses organisations économiques de Guadeloupe savent se réunir et s’exprimer d’une seule voix en fonction des interlocuteurs et des occasions. Il n’en demeure pas moins que sur des questions spécifiques à l’industrie ou aux activités de production, l’expression des principaux concernés que nous sommes est parfaitement justifiée et s’avère beaucoup plus efficiente.

Comment qualifier l’économie locale en ce début d’année ?

L’économie locale est en proie à des incertitudes, ce qui ne jamais sécurisant pour le secteur industriel qui a pour caractéristique de reposer sur des investissements importants qui imposent des durées d’amortissement plus longues que pour d’autres secteurs d’activités. Les poussées inflationnistes que nous avons connu ces derniers temps, l’augmentation des coûts de l’énergie, le problème de la vie chère, les investissements rendus obligatoires par les transitions environnementales, les annonces de réforme de certains dispositifs fiscaux… génèrent une forte pression sur nos activités, ce qui oblige à anticiper et parfois à se réinventer. L’économie locale est constamment contrainte de s’adapter et est soumise à un impératif de flexibilité.

Quelles sont les préoccupations de votre association en 2024 ?

Nous sommes très attentifs à certains sujets qui risquent d’évoluer avec la loi de finances pour 2025 : l’octroi de mer évidemment, la LODEOM sociale ou encore l’aide fiscale à l’investissement. En fonction des orientations qui seront prises, ce sont des sujets qui risquent d’impacter, voire de modifier les équilibres sur lesquels reposent nos activités.
Nous sommes également très soucieux des comportements des consommateurs, de la confiance qu’ils témoignent aux produits issus de l’industrie locale et du soutien qu’ils apportent à l’économie guadeloupéenne.

L’octroi de mer est le sujet de bien des discussions. Est-ce réellement le rempart contre la concurrence extérieure que l’on dit ?

Il est incontestable que cela coûte plus cher de produire de façon industrielle en milieu insulaire que dans un contexte continental, surtout lorsque vous êtes exposé aux mêmes normes. Par conséquent, nous préférons dire que l’octroi de mer permet de compenser les surcoûts auxquels est exposée l’industrie locale, et en cela le dispositif rétablit une forme de déséquilibre en contribuant à renforcer la compétitivité des productions issues de nos usines.

Les importateurs, les grossistes, les distributeurs sont pointés du doigt comme étant les premiers responsables des prix élevés de certains produits. Qu’en dites- vous ?

Il y a plusieurs intervenants dans la chaine de formation du prix final d’un produit jusqu’à sa mise en rayon. La logique qui est la nôtre est la suivante : moins il y aura d’intervenants entre le producteur et le consommateur, plus les prix baisseront.

Retirer l’étiquette CE ne va-t-il pas inciter à importer des matériaux de construction de pays tiers (Chine, Inde, Asie) plutôt que de soutenir des produits locaux, rares il est vrai ?

La dérogation que vient d’accorder le Parlement européen concernant l’importation de produits de construction répond à une demande exprimée par les professionnels du BTP, et concerne pour la Guadeloupe, Saint-Martin, La Martinique, La Guyane et la Réunion, que les produits issus de nos environnements géographiques respectifs, donc il n’y a pas vraiment de crainte à ce niveau étant donné que la mesure est bornée. Nous l’analysons comme un pas supplémentaire dans notre intégration régionale.

L’insécurité est contraire à la bonne marche des entreprises. Que dites-vous à Gérald Darmanin qui est actuellement en Guadeloupe ?

Les dimensions économiques et sociétales sont intimement liées. Il est clair que si nous sommes en voie de délitement, la Guadeloupe deviendrait un territoire de moins en moins attractif, donc accueillerait de moins en moins d’activités et de moins en moins d’investissements. Nous pensons que tout doit être fait pour redonner de l’attractivité à notre Guadeloupe, pour que ses jeunes reviennent s’y installer pour travailler, pour que des touristes fassent le choix d’y séjourner, pour que les familles et les retraités y vivent dans des conditions de sécurité optimales.
Nous souhaitons que l’État soit à nos côtés pour parvenir à créer ces conditions.

André-Jean VIDAL
aj.vidal@karibinfo.com

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